Des femmes sauvent le Royaume du Dahomey (actuel Bénin)

Ségo
04 Mar 2023 21:24 Commentaire(s)
Au XVIIe siècle, le Royaume du Dahomey (ou du Danhomè en langue fon) est un royaume africain,  situé dans le sud de l'actuel Bénin, qui se renforce en conquérant peu à peu des villes sur la côte Atlantique, en particulier le port de Ouidah. Le Dahomey devient alors l'un des plus puissants  royaumes africains où quinze rois se sont succédé… 
On en parle moins mais une FEMME a même régné sur ce royaume et serait à l’origine d'une armée de femmes fortes, courageuses et loyales…Un véritable exemple de leadership féminin qui mérite toute notre attention et nous inspire chaque jour, au sein de l’entreprise Hippotrague. C'était en 1708 et c'était au Bénin. 

Tassi Hangbé, une reine sauve le Royaume 

Tassi Hangbé est la fille du roi Houégbadja, fondateur du royaume de Dahomey, et sœur jumelle du roi Akaba. En 1708, à la mort de ce dernier des suites d’une maladie, c’est elle qui prendra la tête du commandement militaire, sans que l’armée ne soit au courant. Ce n'est qu'au retour de combats victorieux contre une autre tribu ennemie qu’elle se révèle et qu'elle a été publiquement proclamée reine du Dahomey. 

Un règne court mais ô combien marquant pour l’avenir du Royaume

Pendant ses 3 ans de règne, Tassi Hangbé (1708-1711) décide que les femmes aussi devaient aller à la chasse ou encore pratiquer l’élevage, activités jusque-là réservées aux hommes. Et ce n’est pas tout… 

Une garde féminine rapprochée  pour la Reine 

Tassi Hangbé se constitua une garde rapprochée composée des meilleures guerrières.  Elles étaient recrutées et formées dès leur plus jeune âge. Très bien entraînées, lors des guerres tribales et des pillages, elles se montraient sans pitié, allant même jusqu’à décapiter toute personne qui leur résistait. 
Plus tard, l’un dessuccesseurs et roi du Royaume, le roi Guezo (1818-1858) comprit rapidement l’avantage qu’il pouvait avoir en ayant ses redoutables guerrières à ses côtés : elles lui ramenaient des prisonniers, qu’il se chargeait de livrer à un marchand d’esclaves originaire du Brésil, en échange de fusils, de poudre à canon, de tabac et d’alcool. Un trafic lucratif qui a permis au Royaume du Dahomey de consolider sa puissance. 

Troupe d’élite de femmes, structurée et redoutée 

Ces femmes guerrières du Dahomey combattaient à l'arme blanche et à l'arc, comme des hommes. Elles étaient formées au combat Elles étaient souvent envoyées en mission par le roi et devaient conquérir des positions stratégiques comme des forts ou des villages ennemis. Si elles revenaient sans victoire, elles étaient tuées à coups de machette par leurs propres camarades ! 
Source :  l'excellente série "Racines d'Afrique". Une série de la Deutsche Welle, en coopération avec la fondation Gerda Henkel. 

Elles étaient recrutées dans les villages sous contrôle du Dahomey. Elles possédaient leur propre camp d’entraînement, entraînement très dur avec des exercices de sauts à travers des buissons épineux. Des substances qu’elles avalaient les galvaniser et anesthésier leurs douleurs physiques. 
Recrutées parmi les ahosi ("les femmes du roi") à l’adolescence, et sous commandement féminin, leur vie est vouée à l’entraînement physique, intense et quotidien. Vierges, le mariage et la procréation leur sont interdits. Ceux qu’elles capturent finissent décapités. 

Au XIXe siècle,  ce groupe de guerrières représente  environ le tiers de l'armée du Dahomey, soit 4 000 à 6 000 femmes. Portant l’uniforme et entraînées, on les équipe de gourdins, de couteaux...  et de fusils (leur roi ayant troqué des esclaves contre des armes à feu occidentales). 
Elles étaient appelées les «Mino», «nos mères» 
ou encore «Agojié ou Agodjié ou Agoodjié»
Ago = attention, djié hors de moi ? 
« retire-toi, pousse-toi vite. » 
Il faut dire que pour vaincre l’ennemi, elles usaient de leur charme, séduisaient les hommes des tribus voisines puis une fois dans leur lit, les poignardait en criant « Agodjié! » 

«Agoodjié»

De la réalité des Agodjiés au mythe grecque des Amazones : une rencontre brutale et fatale. 

Les femmes soldats du Dahomey sont appelées « Amazones » par les européens 1894 à 1958 qui les ont rencontrées en 1892.  En 1882, le roi Béhanzin, soucieux de protéger ses droits commerciaux, entra en guerre contre la France.  Les colons européens les ont surnommées ainsi à cause de leurs similitudes avec les mythiques Amazones de l’ancienne Anatolie imaginées par  les Grecs comme Homère et d’autres penseurs et poètes. 
Les Français sont d’autant plus déstabilisés, que ces femmes utilisent des techniques d’affrontement physique, le corps à corps notamment, alors qu’ils instaurent une certaine distance, ou le roulé boulé, leur permettant de s’infiltrer sous la haie de baïonnettes. 
Leur compétence militaire est telle qu’il sera nécessaire aux Français de recourir à la Légion étrangère, de se doter de mitrailleuses, d'une cavalerie et d'une infanterie de marine pour vaincre finalement les guerrières à l’issue de plusieurs batailles. Les Légionnaires évoqueront plus tard "l'incroyable courage et audace des Amazones" 
Mais les agodjié ne purent rien faire contre l’armée française, qui était beaucoup mieux équipée, et durent s’incliner, non sans avoir subi d’énormes pertes. 

Malgré les crimes qu’elles ont pu commettre, les agodjié restent un symbole de l’émancipation féminine. Et après avoir été ignorées pendant des années, les voici petit à petit réhabilités : à Abomey, ancienne capitale du royaume du Dahomey, Tassi Hangbé va avoir un musée en son honneur. En attendant, elle est célébrée par sa descendance au cours de cérémonies festives mêlant danses et chants. 

Références fascinantes et lectures historiques sur ces femmes «Agojiés»

Livres sur les agojiés

Hélène d' Almeida-Topor, historienne et universitaire française. Elle était professeure d'histoire contemporaine, spécialiste des études africaines. Elle s'intéressait à l'histoire économique, sociale et culturelle du continent, et notamment l'histoire du Dahomey colonial

Films- vidéos inspirées des Agodjiés
  • Le magnifique documentaire avec l’actrice hollywoodienne Lupita Nyong'o suite au film Black Panthers.  Sur les traces des amazones/Warrior Women with Lupita Nyong'o (2019).(en anlgias seulement)  

 

Matériels intéractifs ou numériques sur les Agodjiés
  • Les femmes soldat du Dahomey – Série UNESCO Femmes dans l’histoire de l’Afrique, produite par la Division des sociétés du savoir du Secteur de la communication et de l’information de l’UNESCO 
    • Une bande dessinée (cliquer ici)
    • Tout un module et un dossier pédagogique très détaillé 
  • PALACE SCULPTURES OF Abomey History Told on Walls Francesca Pique and Leslie H. Rainer 
  • Sur les bas-reliefs des palais d’Abomey 
  •  Une introduction à Abomey 



Réserve ta visite avec Hippotrague, c’est au jour 3 de notre itinéraire.

Murale en plein coeur de Cotonou
Toute nouvelle statut à l'Esplanade de l'Amazone, Cotonou

Si vous voulez vraiment être replongé dans cette histoire, Hippotrague te propose la visite au JOUR 3 de son itinéraire

Vous allez…      

  •   Entrer dans le site historique du Royaume du Danhomey (Palais de Guezo et Glélé), de 1625 à 1900, en comprendre son architecture de terre ici
  • Observer et comprendre l’importance de l’art de cour, la signification des bas-reliefs, de leurs trônes, des armes, des bijoux, des objets de culte.
  • Etre inspiré par le courage et le leadership de la Reine Hangbé et des guerrières du Royaume, les « Amazones » ou plutôt les « Agojié »…

Ségo